Frithjof Schuon fut non seulement un métaphysicien dans la lignée de Shankara, Platon, Plotin et Maître Eckhart, il fut aussi un artiste peintre. Ses tableaux, croquis et dessins illustrent avec profondeur et talent les principes esthétiques exprimés dans ses livres («Le Beau est la splendeur du Vrai» aimait-il à rappeler souvent) et dans ses poèmes. Il a écrit notamment plusieurs chapitres, dans divers livres, sur l’art.

Ce qui frappe, dans tous ces textes, c’est de voir combien Schuon a un sens profond des formes, des formes visuelles et des couleurs en l’occurence. Pour lui, les formes qui nous entourent conditionnent fortement, et insidieusement si elles sont laides, notre âme. Le monde moderne, celui des sociétés industrielles, contrairement aux mondes traditionnels, ceux qui sont en grande partie déterminés par l’une des grandes religions, affiche presque partout le culte du laid et du trivial. Pour réagir contre cette tendance somme toute «diabolique», Schuon redéfinit, avec une clarté sans égal, ce qu’est objectivement le beau (définition qui n’a rien à voir avec les notions de canon esthétique classique) et fait le tour, incidemment ici et là dans ses écrits, de toutes les «beautés» que notre humanité a produites au cours des temps, pour en dégager leur teneur essentielle.

Ses tableaux visent cependant à n’exprimer que le message le plus intime et le plus intérieur de sa doctrine (les extrêmes, le visible et l’intelligible, se touchent).

Pour une vue extensive de l’oeuvre picturale de Frithjof Schuon, nous vous reportons à deux très beaux livres:

  • Le Soleil de Plumes – Art, Symbolisme et Philosophie chez les Indiens des Plaines, Hozhoni, 2021.
  • Images of Primordial and Mystic Beauty, peintures par Frithjof Schuon et par Sharlyn Romaine (dans les vingt dernières pages), avec une introduction de Sharlyn Romaine, World Wisdom Books, USA, 1992.

L’art traditionnel dérive d’une créativité qui combine une inspiration céleste avec un génie ethnique, et cela à la manière d’une science comportant des règles, et non d’une improvisation individuelle; ars sine scientia nihil.

L’oeuvre artistique ou artisanale comporte deux perfections, celle de surface et celle de profondeur: à la surface, l’oeuvre doit être bien faite, conformément aux lois de l’art et aux exigences du style; en profondeur, elle doit pouvoir communiquer la réalité qu’elle exprime. Ceci explique pourquoi l’art traditionnel se réfère à l’ésotérisme quant à la forme, et à la réalisation spirituelle quant à la pratique: car la forme exprime l’essence, et la compréhension de la forme évoque et exige le dépassement de celle-ci en vue de l’essence ou de l’archétype.

L’artiste, en façonnant l’oeuvre — la forme — se façonne lui-même; et comme la raison d’être de la forme est de communiquer l’essence ou le contenu céleste, l’artiste voit a priori celui-ci dans le contenant formel; réalisant la forme à partir de l’essence, il devient essence en réalisant la forme.

Schuon, L’ésotérisme comme principe et comme voie,
1978, «Degrés de l’Art», p.179.


L’existence des vêtements princiers et sacerdotaux prouve que le vêtement confère à l’homme une personnalité, c’est-à-dire qu’il exprime ou manifeste une fonction qui éventuellement dépasse ou anoblit l’individu.

Schuon, Avoir un centre, p. 143

Un des symboles les plus puissants du soleil est la majestueuse coiffure en plumes d’aigle; celui qui la porte s’identifie à l’astre solaire et il est facile de comprendre que tout le monde n’est pas qualifié pour la porter ; sa splendeur — unique en son genre parmi toutes les coiffures traditionnelles du monde — suggère la dignité à la fois royale et sacerdotale; donc le rayonnement du héros ou du sage.

Schuon, Avoir un centre, p.146

C’est «la coiffure la plus majestueuse qu’ait conçu le génie humain», selon Thévenin et Coze (Moeurs et Histoire des Indiens peaux-rouges). Parfois, la parure de plumes est ornée de cornes de bison, ce qui lui ajoute un symbole pontifical. La lance emplumée — le rayon solaire — prolonge la coiffure en mode dynamique et combatif.

Schuon, Avoir un centre, p.146

La dignité est la conscience ontologique que l’individu a de sa réalité supra-individuelle… La dignité reflète l’aspect sacré de l’homme.

Schuon, Perspectives spirituelles et faits humains

L’orgueil, c’est se prendre pour ce qu’on n’est pas et rabaisser les autres; la fierté, c’est savoir ce qu’on est et ne pas se laisser abaisser.

Schuon, Perspectives spirituelles et faits humains

L’homme est ‘fait à l’image de Dieu’; humilier cette image peut être une profanation.

Schuon, Perspectives spirituelles et faits humains

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